mardi 26 décembre 2017

La vie secrète d'Elena Faber de Jillian Cantor




Un roman très pédagogique, tout en étant captivant, qui se fonde sur un ingénieux détail pour renouer les fils du passé. Il y a non seulement une très belle histoire d'amour, mais aussi une réflexion, en arrière-plan, sur ce que fut l'Holocauste ou Shoah. Et on comprend mieux encore, à la lecture de ces pages, ce qu'a pu représenter pour tant de familles juives soudain déboussolées l'opération « Nuit de Cristal ». Celle-ci, pour rappel, fut déclenchée par les nazis en 1938 pour accélérer l'émigration des juifs d'Allemagne et des autres territoires peu à peu occupés sur ordre du dictateur. Et c'est à partir de cette date phare des premiers pogroms que débute en effet le double récit de Jillian Cantor.

De la Shoah à la chute du mur de Berlin


A l'automne 1938 Hitler annexe l'Autriche. Près de Vienne, la synagogue du petit village de Grotsburg où vivent beaucoup de juifs est brûlée par les nazis. Fredericks Faber, un graveur de timbres réputé et sa famille vont vivre l'enfer à cause de leur appartenance à la communauté israélite. Fredericks doit fuir dans la forêt, sa femme est déportée dans un camp de concentration, l'une de ses filles peut gagner l'Angleterre, mais l'aînée Elena, qui aurait pu partir aussi avec sa soeur, choisit de revenir dans sa maison retrouver son amoureux, malgré le risque insensé que cela représente. En fait, Fredericks a récemment embauché un jeune apprenti, Kristoff, et elle ne peut accepter la séparation. La « vie secrète d'Elena » serait oubliée parrmi tant d'autres histoires, si une jeune journaliste de Los Angeles, cinquante ans plus tard ( c'est en 1989 exactement, l'année de la chute du mur de Berlin) n'avait pas découvert un curieux timbre poste, non oblitéré, sur une vieille lettre. Comme celle-ci appartient à la collection philatélique de son père, atteint de la maladie d'Alzheimer, elle se lance dans une vaste enquête qui éclaircira le mystère de sa découverte.

L'esprit de Résistance


La beauté du roman tient à mes yeux à la véracité de ses personnages. Fredericks, le graveur de timbres, qui a représenté une fleur des montagnes autrichiennes, l'Edelweiss, comme « symbole d'une audace peu commune », est criant de vérité dans son attachement à son pays menacé, à sa famille, dans sa volonté aussi de transmettre son savoir à un apprenti pour qu'il poursuive le métier qu'il a choisi. Et ce dernier, Kristoff, lui aussi très réaliste en tant que personnage, va tellement retenir la leçon qu'il va se servir du plus beau timbre de son maître pour inventer un mode de résistance inattendu. Bien sûr le personnage d'Elena est très attachant, car son caractère fort lui permet aussi de contrarier le destin injuste qu'on lui impose. Sans dévoiler la fin du roman, elle incarne aussi l'idéal de paix auquel chacun de nous devrait aspirer.


Le bonheur d'écrire de Jillian Cantor


Il faut saluer la prouesse de l'auteur qui parvient à accrocher en permanence notre attention, à maintenir le suspense, en menant parallèlement deux récits ( un dans le « présent », l'autre dans le « passé ») tout au long du livre. Son style est très simple et très accessible. Cela, à mes yeux, renforce encore, l'empathie que l'on peut ressentir pour les personnages. La manière dont la romancière raconte les effets de la maladie d'Alzheimer sur le père de Katie est très juste, on devine bien que Jillian Cantor a du être confrontée elle même à une épreuve semblable dans sa famille.

Un roman, vous l'avez compris, que je recommande vivement, en ces temps où l'oubli de l'Histoire, justement, pourrait faire naître de nouveaux périls.

Ma prochaine chronique sera le dernier roman de Catherine McKenzie "les nouveaux voisins". Bonnes fêtes!

( date de publication du roman: 4 avril 2018)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire