lundi 8 janvier 2018

Lettres de mon enfance d'Emma Reyes



J'ai découvert sur internet qu'Emma Reyes ( dont plus de deux cents tableaux sont conservés à Périgueux où elle a longtemps  vécu) était née à Bogota en 1919 et qu'elle était décédée à Bordeaux en 2003. Cette artiste proche de Frida Kahlo avait été surnommée pendant les années soixante et soixante dix la « mamá grande » de la peinture colombienne par ses jeunes compatriotes exilés à Paris. Paris, où Emma lança véritablement sa carrière, après avoir gagné un concours de peinture dans son pays natal. Lors de sa première grande exposition en 1949 à la galerie Kléber, un certain Pablo Picasso signa son livre d'or ! Un peu plus tard, elle rencontra à Mexico Diego Rivera.


De la peinture à l'écriture


Par chance pour ses admirateurs, Emma Reyes fut encouragée à écrire par Gabriel Garcia Marquez, puis sollicitée par une importante personnalité colombienne, l'écrivain et diplomate German Arciniegas. Ce dernier lui demanda de raconter son enfance, Emma Reyes accepta, et composa entre 1969 et 1997 vingt-trois lettres admirables qu'elle adresse à « German ». L'artiste y a consigné des souvenirs hors du commun, d'une poignante vérité, qui commencent à partir de l'âge de cinq ans. Ces lettres ont été publiées d'abord en espagnol par un éditeur de Bogotá, puis en France, en octobre 2017, par l'éditeur Pauvert, département de la librairie Arthème Fayard. Coup de chapeau pour cette publication qui honore une grande créatrice !


Des mémoires hallucinantes de vérité


A la lecture d'Emma Reyes, j'ai entendu une voix unique, capable de faire ressurgir les émotions d'une enfant pauvre des bas-quartiers de Bogotá ballotée, livrée à elle même, un temps coupée du monde... On la suit d'abord dans un taudis de la capitale colombienne, puis ensuite dans des villages de la campagne un peu éloignée de Bogotá où « Madame Maria » (qui pourrait être sa mère mais elle n'en dit rien) va travailler dans des chocolateries, au milieu du petit peuple et des Indiens. Jusqu'au jour, où avec sa sœur Helena, Emma va se retrouver abandonnée, et forcée d'entrer dans un couvent, car elle sont considérées toutes deux comme orphelines. Là, parmi les nonnes, elle vont se confronter à une vie religieuse très stricte, le mot est faible, où Emma va cependant recevoir une première éducation et surtout apprendre la broderie, qui est alors son savoir-faire par excellence. Les qualités d'une grande artiste sont en germe. Je ne vous raconte pas le « final » mais c'est sublime.
Ce texte superbe est absolument à lire, il est un modèle parfait d'autobiographie appliqué à l'enfance qu'on devrait davantage montrer dans les ateliers d'écriture. Et un moyen extraordinaire d'accéder à la peinture colorée et tout en mouvements d'Emma Reyes.

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